Aujourd’hui, on se demande si on va passer un chouette Noël.
Cette newsletter a été envoyée aux inscrit·es le 20 décembre 2022.
Pour diminuer notre empreinte carbone, on sait ce qu’il faut faire : ne plus manger de viande, ne pas acheter du neuf, éviter les emballages… Autrement dit, tout l’inverse de ce que l’on fait à Noël. Sans oublier que Noël, c’est aussi le moment où, entre deux désastres écologiques servis à table (oui les coquilles Saint-Jacques et le foie gras, c’est de vous dont on parle), on se retrouve embourbés dans des débats de société imprévus.
Dans cette newsletter, on se demande ce qu’est l’empreinte carbone, quel est le bilan écologique de Noël et… on vous offre un petit guide de survie pour faire face aux débats moisis des fêtes.
Le coup de loupe
Au fait, c’est quoi, l’empreinte carbone ?
L’empreinte carbone, on en parle tout le temps. Mais savez-vous ce qui est calculé dans une empreinte carbone ? Alors, oui, le CO2, mais pas que. L’empreinte carbone représente la quantité de gaz à effet de serre (GES) produite par un individu ou une entité.
Des GES, il y en a plusieurs, et pas uniquement le dioxyde de carbone (CO2) : le méthane, le protoxyde d’azote, les hydrocarbures… Et quand on parle d’empreinte ou de bilan carbone, ils sont tous comptabilisés. Pour que ce soit plus clair pour le grand public, on a choisi de tout mesurer avec uniquement l’unité carbone. C’est-à-dire que dans un bilan carbone, on va convertir le méthane, par exemple, en équivalent carbone.
Quand l’Ademe* explique que « les fêtes de fin d’année sont à l’origine d’environ 6 294 kilotonnes d’émissions d’équivalent », ce calcul contient également les émissions de méthane ou encore d’hydrocarbures. C’est pourquoi on retrouve parfois l’expression « équivalent », même si par souci de simplicité on parle la plupart du temps « d’émissions de CO2 ».
En réalité, l’empreinte carbone fait partie d’un plus grand ensemble baptisé “l’empreinte écologique”. Inventée et développée par deux chercheurs canadiens, cette échelle permet de mesurer l’impact de l’activité humaine sur l’environnement. Dans cette empreinte écologique, on trouve l’impact des pâturages, de la pêche, de l’exploitation du bois… et l’empreinte carbone. Si vous voulez en savoir plus sur l’histoire de l’empreinte carbone, on vous conseille cet article du média Bon Pote. On y parle marketing, lobby pétrolier et responsabilité écologique.
*Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie
Mais alors, Noël, c’est terrible niveau empreinte carbone ?
Oui. Mais en même temps, on s’en doutait un peu : toute l’année on prend le vélo, on utilise un dentifrice solide au goût exécrable et on se démaquille avec un coton lavable qui gratte. Et soudainement, en décembre, on achète tout neuf et suremballé, on mange une quantité astronomique de produits animaux et on installe assez de guirlandes lumineuses pour transformer le salon en piste d’atterrissage nocturne.
En 2021, l’application de bilan carbone Greenly a calculé qu’en moyenne, un foyer français (soit 2,2 personnes selon les chiffres Insee) émet 396 kg de CO2 pour Noël, soit 180 kg par personne. C’est douze fois plus qu’un simple dîner en famille un lundi soir.
L’Ademe a également réalisé une étude selon laquelle les fêtes de fin d’année représentent plutôt 215 kg de CO2 par foyer et 90 kg par personne. L’écart entre les deux études peut s’expliquer par une méthodologie différente : l’Ademe a procédé à une enquête sur un échantillon représentatif de 1 252 personnes et parle des “fêtes de fin d’année” ; Greenly analyse uniquement Noël et s’est basée sur différentes études comme celles de Delabs, LSA-conso, la Fnac… ou encore l’Ademe.
Grâce à ces deux études, on peut tout de même se rendre compte que l’empreinte carbone des fêtes de fin d’année pèse entre 1% et 1,9% des émissions annuelles d’un Français moyen.
En même temps, l’écologie à Noël, on s’en fout un peu, non ?
Eh oui ! Toujours selon l’Ademe, moins d’un Français sur cinq a véritablement en tête le sujet environnemental au moment des fêtes de fin d’année. Qu’on n’y pense même pas, ou bien que l’on considère Noël comme un moment de “relâche”, l’écologie passe à la trappe C’est même moins important que le reste : 52 % des Français estiment que les cadeaux sont un geste indispensable à Noël. Et que ce soit l’Ademe ou Greenly, les deux études sont d’accord : les cadeaux représentent plus de la moitié des émissions carbone de Noël…
On offre en moyenne 6,5 cadeaux par réveillon (oui, le neveu mal aimé a droit à un demi-cadeau), soit 300 millions de cadeaux offerts chaque année en France à cette période… On n’est pas sorti des ronces. L’Ademe, pas bégueule, propose quand même quelque solutions : cuisiner un repas végétarien ferait économiser 35 kg de CO2 ; organiser un Noël Canadien (on tire au sort une seule personne à qui offrir un seul cadeau) diminue l’empreinte carbone de 34 kg ; et si vous comptez offrir un smartphone pour Noël, choisir le reconditionné plutôt que le neuf représente 49 kg de CO2 en moins.
Par contre, ne paniquez pas : un sapin entièrement décoré ne représente que 2 à 6% des émissions de CO2 du réveillon. Donc qu’il soit en plastique, en pot ou coupé, ce n’est vraiment pas le plus important.
C’est arrivé près de chez nous
Le guide de survie au repas de Noël
Autour de la table de Noël, qui êtes-vous ? La féministe qui casse l’ambiance en soirée ? L’écolo qui répète à tue-tête que de toute façon on est condamné·es ? Le végétarien relou qui ne mange que les marrons ? Si vous êtes abonné·es à Revue Far Ouest, c’est qu’il y a de bonnes chances que de nombreux “débats” vous aient fait soupirer cette année. Et si vous avez une famille élargie et que vous fêtez Noël, vous savez qu’ils vont arriver sur la table. Alors, à la rédac, on a décidé de vous donner des billes pour survivre à ces grands moments de solitude.
Voici notre guide de survie au repas de Noël, avec à chaque fois des ressources pour aller plus loin. Pour mettre de l’ambiance entre la bûche et le digestif, et savoir quoi répondre quand votre oncle vous agace, vous pouvez compter sur nous !
« De toute façon, c’est la Chine qui pollue le plus, on peut rien y faire. »
🎄 Déjà, il faut remettre les choses dans l’ordre. L’Europe a longtemps été une très mauvaise élève concernant le réchauffement climatique, notamment par son utilisation intensive du charbon pour faire tourner les industries. À titre d’exemple, au XIXe siècle, Londres était aussi polluée par les particules fines que les villes asiatiques d’aujourd’hui. L’Europe est donc historiquement la source du problème. Et rien n’empêche de faire nous aussi des efforts : dans cette vidéo, Blast fait un tour d’horizon des actions à entreprendre pour agir face à l’urgence écologique.
« Les femmes dans notre pays, elles ont atteint l’égalité, c’est pas comme en Iran ! »
🎄 Merci tonton de faussement t’inquiéter pour le sort des femmes en Iran. Mais depuis le 4 novembre 2022, les femmes bossent gratuitement, ici, en France. À ce jour, l’écart de salaire entre un homme et une femme est toujours de 15,8%, et tend à augmenter (il était de 15,1% en 2016). De leur côté, les femmes noires ont commencé à travailler bénévolement depuis le mois de juin. Et dans la sphère privée, ce n’est pas mieux, puisque plus des deux tiers des tâches domestiques sont assumées par les femmes. Clap de fin : en France, une femme sur 10 sera victime de violence de la part de son conjoint. Donc oui, la situation n’est pas celle de l’Iran, mais on n’est pas non plus sorties de l’auberge.
« Il faudrait peut-être s’occuper de nos SDF avant de donner des aides aux étrangers ? »
🎄 Eh bien, c’est déjà le cas : si on compare les ressources minimales attribuées en France, les Français touchent plus de deux fois plus que les étrangers. Grâce au RSA (le revenu de solidarité active, une allocation de l’État pour les personnes sans ressources), les Français reçoivent en moyenne 564,78 € par mois. Les demandeurs d’asile survivent eux avec en moyenne 204 € par mois. Et si tu veux vraiment être incollable sur le sujet, tu peux t’informer sur le lexique de l’immigration de Guitinews. Parce que non, les migrants, les réfugiés ou les déplacés n’ont pas les mêmes réalités.
« Mais la transidentité, c’est une mode ! »
🎄 Avant d’embarquer dans ce débat houleux entre deux coupes de champagne, on souffle un bon coup. Non tatie, il ne s’agit pas d’une mode, et ta remarque est transphobe. La revue de l’Académie américaine de pédiatrie a publié en août dernier une étude de grande ampleur qui confirme que les taux de transition ne sont pas soumis “à des logiques d’influence sociale, d’effet de mode”. Les chercheurs ont d’ailleurs observé que les transitions de genre masculin vers féminin ont baissé en deux ans. Le pourcentage d’ados assignés femmes à la naissance et qui s’identifient comme transgenres ou de genre divers a aussi diminué en deux ans. Mais en plus, la communauté trans reste à ce jour le groupe sociologique le plus touché par le suicide, donc difficile de dire qu’on est trans pour “être à la mode”. Une étude de l’institut Williams relayée par Slate montre que 46% des hommes trans et 42% des femmes trans ont déjà fait une tentative de suicide aux États-Unis.
Si vous en avez marre d’être à côté de la plaque sur les questions de transidentité, ce podcast de Soif de Sens devrait vous aider. Lexie, militante transgenre, assignée garçon à la naissance, raconte son parcours et sa transition.
« La prison en France, c’est le Club Med ! »
🎄 Aïe, même au moment de la bûche, ça coince. Et là encore, on peut sortir les chiffres : la prison c’est tellement bien que la France a été condamnée 8 fois en 10 ans par la Cour Européenne des droits de l’Homme pour ses conditions indignes de détention. Et du côté de chez nous, ça n’est pas bien mieux : le tribunal administratif de Bordeaux a examiné la demande présentée par le Barreau de Bordeaux, l’Observatoire international des prisons (OIP) et l’association pour la défense des droits des détenus. Leur souhait ? Que le juge prennent des mesures en urgence pour améliorer le sort des détenus du centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan.
Et si les conditions de vie des personnes privées de liberté, à chez Far Ouest on a sorti une newsletter sur les CRA, les centres de rétention administrative, des prisons qui n’en portent pas le nom.
On vous souhaite de sortir indemne de ces “débats” et de profiter des bons côtés de vos proches, histoire que ça ne finisse pas en défaite de famille.
– Cette newsletter a été conçue par Clémence Postis, Amandine Sanial, Ana Hadj-Rabah et Margaux Pantobe.