C’était il y a un an, au printemps 2020. Alors que tous ses projets professionnels s’arrêtent avec le reste du monde, mis sous cloche durant le premier confinement, l’artiste bordelais Senbeï décide de produire un nouvel album un peu particulier. Sur un groupe Facebook, près de 500 fans collaborent avec lui à la réalisation de treize morceaux, en envoyant des sons, des samples, des prises de voix et même des bruitages. Quatre mois plus tard, l’album collaboratif « Tōitsu » voit le jour.
Avril 2020. Alors qu’il enchaînait les projets professionnels, l’artiste bordelais Senbeï, confiné chez lui comme le reste du pays, voit à son tour son activité s’arrêter. « Je n’avais plus rien à faire, j’étais dans une période de creux. Alors je me suis dit : comme tout le monde est coincé chez lui, comme moi, pourquoi ne pas lancer un projet collaboratif en faisant appel à mes fans ? »
De cette réflexion naît l’idée de créer une communauté virtuelle, regroupée autour d’un projet commun, celui de créer un nouvel album collaboratif et confiné. « J’ai demandé aux gens, via Facebook, de m’envoyer plein de trucs : des sons, des samples, des prises de voix, de chant, des bruitages même ! J’ai créé un groupe Facebook, et je leur ai dit : à partir de maintenant, on est tou·tes ensemble, on bosse ici, envoyez-moi n’importe quoi, je vais essayer de faire un morceau avec. »
La communauté enfle rapidement, jusqu’à atteindre en peu de temps les 500 membres. « Tout l’album a été fait en quatre mois, ce qui est assez fou, reconnaît le DJ. Il y a eu trois mois de composition, puis un mois de mixage, ensuite on était au mastering et puis voilà, c’était fait. » De ce confinement créatif ressort treize morceaux. Reste à choisir son nom, départagé par un vote : « Les membres du groupe ont fait des propositions, puis on a fait un sondage, rapporte le musicien bordelais. “Tōitsu”, ça signifie tout simplement « unification » en japonais. » La couverture de l’album se veut elle aussi collaborative : « Tout le monde a envoyé sa petite photo sur le groupe, puis on a fait un espèce de montage à partir de mon avatar de musicien. Tout est parti de ce groupe en fait. »
Un prélude en intro
Grâce à ce groupe virtuel, Senbeï fait la rencontre de nombreux musiciens. Parmi eux, Kevin, un pianiste de Marseille. « Il est arrivé tard dans le projet, se souvient le producteur. Il m’avait envoyé quelque chose, mais j’avais quasiment fini tous les morceaux, j’étais déjà dans une phase où j’avais plus ou moins fini la tracklist. Et puis un jour, j’ai écouté et ça a été une claque. »
Senbeï propose alors au musicien de composer un morceau, « de faire un freestyle au piano en gardant la grille musicale du titre suivant afin de le mettre en intro. Et j’ai trouvé ça tellement bien que j’ai décidé de faire un vrai prélude sur une seule piste. Au final, ce morceau, je n’ai rien fait dessus, c’est uniquement Kevin qui joue du piano. Je pense que c’était la meilleure manière de commencer un album collaboratif finalement. »
Musicien 2.0
L’album Tōitsu sort en novembre. Pas peu fier du résultat, l’artiste bordelais décide de prolonger l’expérience : « Maintenant qu’on a réussi à souder une communauté, on va essayer de leur proposer le plus de choses. »
« J’ai commencé à faire du Twitch, relate Senbeï. Il s’agit de live streaming, et ça marche plutôt pas mal. Mais c’est de la messagerie instantanée par contre, donc il faut y être tout le temps et parler avec la communauté sans cesse. »
Car pour le DJ, l’utilisation de plateformes numériques est aujourd’hui indissociable de sa profession. « Pour moi, c’est un nouveau moyen de communication. Savoir jouer d’un instrument, c’est un tiers du métier aujourd’hui. Le deuxième tiers, c’est maîtriser les médias, maîtriser les réseaux sociaux. Et le troisième, c’est la technique. Au-delà de savoir jouer, savoir s’enregistrer soi-même, aujourd’hui, c’est fondamental. »