Une bataille contre les algues vertes se déroule depuis une dizaine d’années sur l’île de Ré. On les connaît surtout pour leur présence sur les côtes bretonnes mais elles pullulent désormais sur l’ensemble du littoral Atlantique. En Charente-Maritime, le phénomène se concentre sur la très touristique commune de La Flotte. Localement, les défenseurs de l’environnement dénoncent l’inaction face à un grave problème écologique.
Illustration : Manon Jousse
« Ça commence tôt cette année, ça n’augure rien de bon. » Début juin, Pierrick François a ramassé les premières algues vertes de la saison sur la plage de La Clavette, à La Flotte, une commune rétaise de moins de 3 000 habitants. « La fois où on a eu le plus d’algues, ça avait commencé exactement comme cette année. On peut s’attendre à de grosses perturbations », enchaîne le président de l’AEMA, l’Association des étangs et marais d’Ars-en-Ré. Mandatée par la mairie de La Flotte, elle nettoie les plages de la commune envahies par les laitues de mer chaque été depuis 12 ans.
Tout près de la plage de La Clavette, très touristique, les restaurateurs en sont les premières victimes, car leurs clients désertent à chaque fois que les algues deviennent odorantes. Au bout de trois jours, les végétaux échoués commencent à se décomposer et à dégager une odeur d’œuf pourri. Les ulves relâchent en fait de l’hydrogène sulfuré, du H2S, un gaz très toxique qui peut être mortel en cas de fortes inhalations. Le phénomène avait eu un certain écho à l’été 2009, lorsqu’un cheval est mort sur une plage des Côtes-d’Armor, en Bretagne, à cause d’algues vertes en décomposition.
À quelques encablures de la plage de la Clavette, Léon Gendre, le maire de La Flotte, me reçoit dans son bureau. Chaque été, il appréhende l’arrivée des algues. « Les restaurateurs m’appellent en hurlant. C’est très contraignant et stressant », déplore l’édile de droite (Les Républicains), à la tête de la mairie depuis 42 ans.

Pour se débarrasser du problème, aussi gênant pour les touristes que pour les habitants, il est prêt à débourser 60 000 euros en moyenne chaque année. Une enveloppe entièrement destinée à l’AEMA. En période estivale et tous les trois jours environ, l’association nettoie les zones touchées par les algues vertes à grand renfort de pelleteuses. L’opération peut durer jusqu’à sept heures pour une plage d’à peine un kilomètre de long.
L’agriculture intensive en cause
Un investissement de temps et d’argent qui met le maire en colère. Pour lui, les coupables sont les agriculteurs du Marais poitevin. Léon Gendre m’expose sa théorie : « Ils font pousser beaucoup de plantes céréalières et pour avoir toujours plus de rendements, ils utilisent beaucoup d’engrais. Ils en mettent souvent trop, ça s’écoule dans les fossés puis dans les rivières qui rejoignent la Sèvre Niortaise et comme son embouchure est située à environ 20 kilomètres de chez nous, les algues se retrouvent sur nos plages. Nous sommes des victimes. »
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