Aujourd’hui, en France, seulement deux méthodes de contraception masculine sont reconnues par la Haute Autorité de santé (HAS). Le port du préservatif masculin et la vasectomie, une opération consistant à sectionner les canaux déférents, reliant les testicules à la prostate, pour empêcher le passage de spermatozoïdes.
D’autres méthodes contraceptives existent, mais ne sont reconnues ni par l’OMS ni par les autorités de santé en France. C’est par exemple le cas de la méthode thermique. Depuis les années 1980, une équipe de médecins toulousains travaillent sur ce principe : en remontant les testicules, leur température augmente de quelques degrés grâce à la chaleur corporelle et va ainsi mettre la production de spermatozoïdes en sommeil.
Plusieurs techniques utilisant ce principe existent comme le slip chauffant, le jockstrap ou l’anneau thermique Andro-Switch, conçu par le bordelais Maxime Labrit.
Pourquoi faire une expérience clinique sur la contraception masculine ? me disaient-ils. C’est un problème réglé.
Et l’histoire de l’anneau thermique inventé par Maxime Labrit est finalement le parfait exemple de ce qu’à l’habitude de subir la contraception masculine. Un parcours du combattant.
Pour le Bordelais, tout débute en 2017. Ancien infirmier, il se retrouve dans une impasse contraceptive avec sa compagne. C’est comme ça qu’il se renseigne sur la contraception masculine et se rend compte de sa pauvreté. Aucune des techniques proposées ne lui convient, alors il décide de créer sa « solution ». « Je me renseignais sur la contraception thermique, et en étant dans le milieu médical, je me suis dit mais est-ce qu’un simple anneau ne pourrait pas le faire ? C’est comme ça que j’ai atterri dans un magasin de bricolage, pour acheter des joints et imaginer le concept. »
Seul face aux professionnels de santé
Pendant trois ans, il se lance dans une phase intense de recherche et développement. Aidé par des ingénieurs, il s’intéresse au design, au biomimétisme, identifie les formes et les structures qui pourraient convenir à cette partie du corps.
En parallèle, il se renseigne pour vendre son anneau comme un dispositif médical, « et c’est là que je me suis rendu compte à quel point c’était long, compliqué, cher, et tout simplement impossible de faire ça quand on est un individu isolé », confie-t-il. Lorsqu’ils se tournent vers des professionnels de santé, « ils rigolent. Pourquoi faire une expérience clinique sur la contraception masculine ? me disaient-ils. C’est un problème réglé. »
Maxime ne se démonte pas. Il transforme le garage de ses parents à Saint-Médard-en-Jalles en un laboratoire, et fabrique son anneau thermique en petite quantité.

Celui-ci commence à être commercialisé en 2020 par son entreprise Thorème. L’idée est simple : en enfilant l’anneau au niveau de la verge et du scrotum vide, les testicules remontent à hauteur du pubis. À cet endroit, ils ne peuvent pas réguler leur température et se retrouvent donc à la même température que le corps. « J’ai pas inventé la contraception thermique, mais un outil qui permet de l’utiliser », insiste-t-il.
Avant d’utiliser l’anneau, Maxime Labrit conseille « d’aller voir un médecin pour voir si on est apte à ce type de contraception ». L’effet de l’anneau n’est pas immédiat. Il faut le mettre 15 heures par jour pendant trois mois, pour arriver à un effet contraceptif. Puis, une fois cet effet atteint, il faut effectuer des spermogrammes tous les trimestres, pour vérifier son efficacité.
Vite rattrapé par l’ANSM
Rapidement, l’anneau suscite un vif intérêt auprès des consommateurs, mais aussi des médias. Une cote qui lui cause des soucis. Suite à l’emballement médiatique, les instances sanitaires françaises s’intéressent à ce dispositif qui n’a été ni validé par un essai clinique ni mis aux normes européennes. Ainsi, en décembre 2021, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) interdit la commercialisation de l’anneau jusqu’à ce qu’il soit mis aux normes.
Leurs arguments ? Un risque de grossesse non désirée, « d’éventuelles atteintes à la santé des utilisateurs, en particulier ceux qui présenteraient des facteurs d’hypofertilité » ou encore « des problèmes de santé aux enfants qui auraient été conçus avec ce dispositif de contraception ou au cours des 6 mois suivants son arrêt ».

Problème : pour obtenir cette fameuse certification européenne, le créateur doit réunir 1 million d’euros et réaliser des études cliniques longues, qui demandent près de cinq ans. « Une goutte d’eau dans le marché de la contraception, mais une mission impossible pour une personne isolée », assure le créateur de l’Andro-Switch.
Aujourd’hui, il est épaulé par Entrelac, une coopérative d’intérêt collectif fondée en 2022 qui donne un coup de pouce à la société bordelaise Thorème pour qu’elle obtienne la certification. Elle a notamment obtenu une aide de 300 000 dollars de la part du fonds américain Male contraceptive initiative.
Malgré ça, l’avenir de cet anneau demeure incertain. Mais son créateur garde espoir et souhaite authentifier le produit d’ici 2028, ce qui lui permettrait de le vendre en pharmacie et d’être remboursé par le système de santé.