Être un champion ou tout sacrifier pour le devenir… Voilà les deux seules options d’Enzo. À 15 ans, ce jeune espoir de la boxe thaïlandaise ne vit que pour son rêve : le titre mondial. Sans soutien, sans sponsors, sans encouragements, il ira pour cela, seul ou presque, jusqu’au bout de lui‑même, dans l’indifférence la plus totale.
C’est un combat auquel il ne s’était pas préparé. Quand Enzo a enfilé les gants pour la première fois, alors qu’il n’était encore qu’un petit garçon de six ans. Lorsqu’il a gagné ses premiers matchs de boxe thaïlandaise. Puis ses premiers titres, ses premiers K.O., en France et plus tard par-delà l’Europe et l’Asie… Depuis presque dix ans maintenant, Enzo s’est préparé à tous les assauts et a déjà soulevé sur son passage de nombreux trophées. Mais toutes ces victoires semblent pourtant vaines au regard de cette épreuve.
Un combat qu’il doit disputer afin qu’une bascule décisive s’opère dans les années qui viennent. Pour la première fois, Enzo est donc face au doute… S’il parvient à rallier à sa cause un soutien moral et financier, il pourra être assuré de l’élan nécessaire au lancement d’une carrière sportive internationale et florissante. Dans le cas contraire – et il le sait déjà du haut de ses 15 ans – malheur à lui… Enzo encaissera les coups comme il a appris à le faire dès l’enfance, mais il n’aura pas de prise sur son opposant. Car aujourd’hui l’adversaire de ce collégien affable et déterminé, c’est l’indifférence.
Le rêve d’un titre mondial ne se borne pas en effet aux seules compétences physiques et sportives et c’est de sa capacité à mobiliser des soutiens que son avenir dépend aujourd’hui. « À ce niveau-là, la préparation, les entraînements, les déplacements à l’étranger, en Thaïlande… ça coûte très cher. Pour continuer maintenant, j’ai besoin d’un peu d’aide », admet sobrement cet ado dont le ton et le vocabulaire trahissent toutefois l’acceptation d’une possible désillusion. Fébrile et grave à la fois, comme si à cet âge-là, il était permis d’oublier l’insouciance, considérant seulement la réalité dans ce qu’elle a de pire et de meilleur à offrir.
À l’ombre des sports populaires
L’indifférence et l’oubli le guettent en effet. Et en dépit de tout le travail qu’Enzo doit fournir pour devenir le meilleur de sa discipline sportive, c’est surtout contre ce fléau qu’il doit se relever les manches. Car pour espérer combattre au plus haut niveau, il faut avant tout exister. Le jeune boxeur nous a donc invités à Biganos en Gironde, dans sa vie, le temps d’une séance d’entraînement.
Autant dire « son univers » au regard du temps qu’il passe quotidiennement entre les quatre murs dépouillés du Fighting club Boïen, l’école de boxe multidiscipline gérée par le père d’Enzo, Philippe Payrastre. La modeste salle communale mise à disposition du club est à l’image du combat d’Enzo pour exister : elle supporte le poids d’un monde qui ne veut pas vraiment d’elle. […]
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Retrouvez cet article dans Revue Far Ouest : Courage.
Qu’ils portent de grandes causes ou qu’ils luttent au quotidien pour leur survie, nous avons voulu vous raconter ces courageux et ces courageuses, qui souvent s’ignorent.