Avec les nouvelles routes migratoires remontant de l’Espagne via le Pays basque, le département de la Gironde voit affluer des centaines de jeunes migrants isolés. D’abord totalement dépassés, le monde associatif, les élus et le conseil départemental, compétent dans le cadre de l’Aide sociale à l’enfance (ASE), tentent de faire face à cette situation inédite.
C’est durant l’été 2018 que les choses se sont réellement accélérées. En plein centre de Bayonne, autour de la gare routière, le nombre de jeunes migrants isolés a grandi progressivement, puis, subitement, s’est multiplié au gré des arrivées dans des bus « Macron » en provenance d’Espagne. Les routes de la Libye et de l’Italie étant coupées, ils sont de plus en plus nombreux à arriver en Europe via le Maroc et l’Espagne. La plupart d’entre eux sont originaires d’Afrique de l’Ouest, principalement de Guinée Conakry, du Mali ou de Côte d’Ivoire et ont transité par le Sénégal ou le Niger. Certains remontent ensuite par le Pays Basque, où, en deux mois, 2500 réfugiés ont transité par un centre d’accueil ouvert dans l’urgence à Bayonne.
La démarche, d’abord spontanée, a ensuite bénéficié du soutien de la mairie par l’intermédiaire du premier édile Jean-René Etchegaray. En juillet, il intervient lorsque les chauffeurs de la compagnie Flixbus exigent les identités de voyageurs, ou lorsque des migrants sont débarqués par les forces de l’ordre. M. Etchegaray dénonce alors une discrimination raciale et va même jusqu’à ériger une barricade de poubelles pour barrer la route aux bus récalcitrants. Avocat de formation, ni gauchiste engagé, ni militant altermondialiste, l’homme politique centriste, très respecté et apprécié, est aussi président de la communauté d’agglomération : « Nous n’avions pas pris la mesure du phénomène. En juillet, des gamins dormaient aux abords de la gare routière, il y en avait chaque jour davantage. La population a commencé à s’inquiéter, même si aucune bagarre, ni vol ou autre n’a eu lieu » précise le maire.

Dès le mois d’octobre, un parking chauffé est mis à disposition, des bénévoles commencent à affluer, la communauté protestante met son temple à disposition. Lors des vacances de la Toussaint, c’est une école qui est réquisitionnée, toujours par la mairie, alors que rien ne l’oblige à le faire : l’accueil de ces exilés dépend de l’État, et donc de la préfecture, ainsi que du conseil départemental pour des mineurs qui représentent à eux seuls 60 % des arrivées.
La suite, c’est donc la création de « La Pausa », un lieu ouvert dans d’anciens bâtiments militaires. Un point de chute, après les circuits de passeurs ou les voyages en solitaire, tenu à bout de bras par près de 400 bénévoles qui fournissent repas, hébergement, accompagnement administratif ou médical. « Je me suis investi et la mairie aussi pour des raisons humanitaires, contre la pression de la préfecture, mais surtout en voyant cet engagement citoyen propre au Pays Basque, » précise M. Etchegaray. Mais aussi en voulant éviter qu’une situation analogue à celle de la « jungle de Calais » ne se produise le long de l’Adour. Dans la foulée, la municipalité vote une subvention mensuelle de 70 000 euros pour La Pausa dont la fermeture est prévue au mois d’août 2019.
Un travail est mis en place avec la Région pour intégrer les mineurs dans des CFA, en prenant en compte leurs spécificités (pays d’origine, religion, culture, langue et niveau d’études), et deux foyers d’accueil pérennes ont été construits. Mais pour certains, Bayonne n’est évidemment qu’une étape et la plupart veulent rejoindre de grandes villes, dont Bordeaux en premier lieu.
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