Dans le Sud-Ouest, on dit chocolatine. Mais pourquoi ? Tout le monde a son explication, mais beaucoup sont fausses. Heureusement, Popex est là.
Chocolatine ou pain en chocolat ? C’est « la » question à poser si vous voulez mettre le feu à Twitter. Mais d’où vient le mot « chocolatine » ? Dans l’épisode du jour de Popex, Laura a décidé partir sur les traces de la star des goûters pour tenter de comprendre pourquoi, en Nouvelle-Aquitaine, on ne dit pas « Pain au chocolat ».
Pour commencer notre enquête, un petit voyage dans le temps est nécessaire. L’une des théories autour de l’origine de l’incontournable de nos petits-déjeuners vient de la présence des Anglais en Aquitaine. Il y a 870 ans, Aliénor d’Aquitaine épouse Henri II. Par cette union, le territoire aquitain passe sous administration anglaise. Ces siècles de cohabitation auraient permis aux Anglais de goûter et d’apprécier la gastronomie française. Dont une recette à base de pâte feuilletée et de chocolat, qu’ils choisissent de nommer « Chocolate in bread ». Les années passent et le mot se métamorphose progressivement en « chocolatine ».
Malheureusement, cette théorie est impossible pour plusieurs raisons. Le premier indice réside dans sa recette : son ingrédient principal, le chocolat, n’existe pas au Moyen-âge. C’est seulement au XVIe siècle que le conquistador Hernan Cortés importe le chocolat en Europe. Soit 75 ans après la fin de la guerre de Cent Ans et la fin de toute relation entre l’Angleterre et l’Aquitaine.
Un deuxième élément contredit cette légende : le territoire aquitain n’a jamais vécu sous l’occupation anglaise, comme on le dit souvent. Les Anglais n’étaient que suzerains, il n’a jamais été question d’imposer la langue anglaise sur le duché. En Aquitaine, personne n’a jamais parlé la langue de Shakespeare. Cette fabuleuse hypothèse est donc totalement fausse.
Mais alors, pourquoi dit-on chocolatine dans le Sud-Ouest ? L’origine du nom de cette viennoiserie se trouverait… à Vienne !
De Vienne au Sud-Ouest
En effet, le mot « viennoiserie » est une référence à la ville autrichienne de Vienne, où les boulangers viennois ont commencé à concevoir de nouveaux desserts, à mi-chemin entre le travail du pain et celui du gâteau.
La naissance de la chocolatine remonte ainsi au XIXème siècle, dans les années 1830. Auguste Zang, un boulanger-pâtissier autrichien débarque à Paris et fait découvrir aux Français les viennoiseries. Dans son arrière-boutique, au 92 rue de Richelieu, il confectionne une brioche en forme de croissant au chocolat qu’il appelle « schokoladencroissant ». La recette d’Auguste Zang est encore éloignée de notre mythique chocolatine, mais son histoire commence à se dessiner.
En effet, en enlevant « croissant », il reste « schokoladen » qui ressemble curieusement à « chocolatine ». Le mystère s’éclaircit, mais une question subsiste : comment schokoladen devient-il « chocolatine » ?
Pour cela, il faut revenir en Nouvelle-Aquitaine et s’intéresser aux langues régionales. Dans le Sud-Ouest, on parle l’occitan. Et en occitan, il est courant d’ajouter le suffixe « -ina » aux choses que l’on trouve mignonnes ou que l’on aime bien. Les habitants du Sud-Ouest ont dû particulièrement apprécier la création d’Auguste Zang, puisqu’il ils y ont accolé ce suffixe. Au fil du temps, « schokoladen » s’est ainsi transformé en « chocolatina », puis en « chocolatine ».
Autrefois, les Occitans se sont approprié un mot autrichien ; et aujourd’hui des milliers de personnes utilisent chaque jour un mot tiré d’une langue régionale pour désigner leur goûter.