« Le machisme tue tous les jours, le féminisme n’a jamais tué personne ». Cette célèbre citation de la journaliste et militante Benoîte Groult est brandie depuis des décennies par le discours féministe majoritaire. Mais est-il vrai que le féminisme n’a jamais tué personne ? Dans son premier essai « La terreur féministe : petit éloge du féminisme extrémiste », la militante franco-espagnole Irene (se prononce Iréné), 22 ans, a décidé de raconter une autre histoire du féminisme en retraçant les parcours singuliers de Valérie, Ita, Maria, Anna, et bien d’autres. Leur point commun : avoir fait usage de la violence pour lutter contre le patriarcat.
Photo de couverture : Jeanne Menjoulet
Irene est autrice et militante féministe. Elle nous amène à voir comment « face à un système qui maltraite et peut aller jusqu’à tuer les femmes, riposter avec violence est vital, légitime et nécessaire. Car oui, le féminisme a bel et bien commis des crimes, et c’est tout à son honneur. » Nous l’avons rencontré à l’occasion de sa venue à la Librairie du Muguet à Bordeaux.
Pourquoi écrire sur la place de la violence dans le féminisme ?
Au départ, j’ai commencé par m’intéresser au sujet de la violence dans les luttes. Alors qu’on parle souvent de la violence dans les milieux militants de gauche par exemple, je me suis rendue compte qu’il n’y avait même pas de débat en ce qui concerne le féminisme. C’est comme si, de fait, on considère que la violence ne peut pas être le fait de femmes.
J’ai eu envie de comprendre pourquoi la question de la violence dans le féminisme ne se posait même pas. Est-ce la réalité de dire qu’il n’y a jamais eu de violence dans le féminisme ? Est-ce que ça a toujours été le cas ? Est-ce légitime de le présenter comme le mouvement de lutte pacifique par excellence ?

À partir de ces interrogations et de mes recherches, j’ai commencé à en apprendre beaucoup plus sur le mouvement et découvert des figures féministes qui ont fait usage de la violence. Ce travail de recherche m’a pris environ deux ans. Et de là est né le livre.
Pourquoi ne peut-on associer les femmes à la violence ?
Je pense qu’il y a une raison essentielle : on a beau être féministe, on n’est pas pour autant dépourvu de constructions patriarcales et de comportements sexistes. Il faut savoir que le rôle traditionnellement attribué aux femmes par le patriarcat, c’est le silence, la passivité, la complaisance. Or, il s’avère que, même parmi les féministes, il est parfois difficile de se dire qu’on a le droit de mener un mouvement politique qui déplaise, voire qui fâche les hommes. On est en colère et on a le droit de l’être, parce qu’on lutte contre une oppression, parce qu’on veut leur retirer des privilèges. On est légitime à mener ce combat et on n’a pas besoin de rassurer les hommes.
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